
Quand on est né esclave, mourir est un fait comme un autre, une douleur de plus, un mauvais jour de trop. Son père l’a vécu dans sa chair. Il est mort aux champs, épuisé de fatigue. Son grand-père succomba d’une balle dans la nuque. Il avait soixante ans et souffrait de partout. Mais pas lui. Plus maintenant. Il a été affranchi. Il est devenu libre. Un homme parmi les hommes. Il a le droit de vivre et de rêver sa vie sans penser à la mort.
Chronique d’un roman pétri d’humanité
Un homme, tout juste arrivé en ville, s’effondre au milieu de la rue. Il meurt, sa langue est noire. Il est le cas zéro. La première victime de la Fièvre.
Keathing tient le journal local. Raciste, suprémaciste, c’est un vrai type du Sud qui ne digère pas la victoire des Yankees et l’affranchissement des noirs. Annie Cook est française. Elle tient un lupanar et ne pense qu’à faire de l’argent. La Fièvre va bouleverser leur vie.
Voilà un roman magnifique, porté par une plume de haute voltige qui ne cesse de me surprendre ! Troisième roman de l’auteur et un style qui me touche de plus en plus.
Cette histoire, basée sur des faits réels, nous est contée par Sébastien Spitzer avec poésie, humanité et des mots qui s’enchaînent avec la grâce d’une danseuse étoile.
Memphis, 1878, la Guerre de Sécession est passée mais les Noirs restent souvent esclaves, le Ku Klux Klan fait des ravages, et les enfants métis ne savent quelle place trouver dans cette nouvelle société. C’est dans ce contexte que s’abat cette mystérieuse fièvre. Un contexte particulièrement bien décrit par l’auteur qui a su le fondre dans son histoire sans laisser le sentiment de donner une leçon d’Histoire. Chaque mot est posé pour nous faire ressentir mille et une émotions. De la colère contre le KKK de Keathing , de l’affection pour la jeune Emmy, métisse à la détermination sans faille, de l’admiration pour T. Brown, ancien esclave… On sourit à la bienveillance, nos cœurs se serrent pour une main tendue, les larmes perles quand la faucheuse achève son oeuvre. Quand la maladie arrive, emportant avec elles les femmes et les hommes sans distinction de race, de classe sociale, d’âge, certains choisissent le camp de la peur qui amène à la haine, quand d’autres se découvrent humains, altruistes.
Sébastien Spitzer nous offre, comme un cadeau, des personnages qui se dévoilent peu à peu, dans leurs histoires personnelles, leurs lutteS, leurs failles. Des personnages qui bousculent et touchent. Des personnages que vous n’êtes pas prêt d’oublier…
La fièvre est un roman sur l’entraide au cœur de l’enfer, un roman sur l’ Homme dans ce qu’il a de laid mais surtout dans ce qu’il a de plus beau. C’est un roman où l’HUMAIN a plus de valeurs que l’argent, la haine ou le pouvoir. Un roman qui, dans le contexte d’aujourd’hui, nous rappelle qu’une main tendue est parfois la meilleure arme contre la maladie.
La fièvre, de Sébastien Spitzer, publié le 19 août 2020 aux éditions Albin Michel.
Très jolie chronique ! Je note…
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Avec plaisir Nath. C’est un beau roman qui mérite d’être lu 🙂
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